REVE D’AVRIL

à P.P.

Lentes, lentes des barques glissent

Ainsi que de lointains remords

Et des rêves d'amour se tissent

Sur la trame des rêves morts.

 

Mon coeur qui ce soir se confesse

Egrène les jours révolus ;

Ma mémoire exhume et caresse

Tous les rêves qui ne sont plus.

 

Du fond d'une barque qui passe

Un air aux accords languissants

Hésite à monter, puis s'efface

Dans l'air lourd du soir finissant.

 

De grands yeux, des yeux bleus de rêve

Ont fixé un instant mes yeux,

Puis s'éteignent - vision brève -

Dans l'éclat de leurs rêves bleus.

 

Je songe à ces yeux d'un bleu tendre

Dont j'ignore encor le secret,

Et mon rêve trop las d'attendre,

N'est plus fait que d'un lourd regret ...

 

... Lentes, lentes les barques glissent

Ainsi que de lointains accords,

Et des rêves d'amour languissent

Sur la trame des rêves morts.